Grimpe sur le granite de l’envers des aiguilles de Chamonix
Il n’est jamais trop tard pour visiter un site d’escalade à côté de chez soi. Pour moi ce site est l’envers des aiguilles dans le massif du Mont-Blanc. Ce n’est pas faute d’avoir acheté le topo il y a 15 ans, je n’avais jamais mis les chaussons sur le granite des aiguilles de Chamonix avant cet été ! C’est désormais chose faite.
C’est avec Florence, grande amatrice de granite, que nous avons parcouru 3 jolies voies classiques de l’envers : Opium du Peuple, Children of the Moon et Tout Va Mal. J’ai choisi de présenter les 2 voies qui m’ont le plus plu. Récit de 3 jours de grimpe avec vue imprenable sur la Mer de Glace, la Verte et les Jorasses.
L’aventure commence au Montenvers par des descentes et des montées d’échelles. Si vous n’êtes pas pompier dans l’âme, un petit temps d’adaptation à cet exercice sera nécessaire pour être à l’aise au-dessus des grandes dalles granitiques laissées à nu par le recul de la mer de glace depuis un siècle : le glacier a perdu pas loin de 170 mètres d’épaisseur en 100 ans ! 3 heures seront nécessaires pour atteindre le refuge depuis le train du Montenvers car contrairement au début du siècle, ça monte…
Notre camp de base est le refuge de l’Envers des Aiguilles situé à 2500 mètres d’altitude où Evelyne et Agathe accueillent les grimpeurs en saison de juin à septembre. L’ambiance dans le refuge est détendue et conviviale. La plupart des grimpeurs viennent parcourir les voies modernes des aiguilles ce qui en fait un peu un endroit à part entre montagne et grimpe moderne. Mais il ne faut pas se tromper : on est en montagne, et se servir d’un piolet et de crampons sera nécessaire pour accéder à la plupart des voies.
Opium du peuple à la pointe orientale de l’arête SE de Blaitière : le calme avant tout
Cette jolie petite voie vaut le détour pour sa tranquillité. Pour y accéder, on dépasse les voies classiques des pointes des Nantillons : Amazonia, Georges V et Guy Anne pour prendre pieds sur le glacier du même nom.
Les longueurs en 5 peu soutenues s’enchainent. Cette voie est une intro assez agréable à l’escalade dans ce coin du massif. Le haut de la voie se déroule sur un pilier un peu plus raide.
Attention à la descente : La descente se fait en rappel « pendulaire ». Avec quelques mètres de neige en moins qu’à l’ouverture, oubliez le concept ! Soit vous avez 2 brins de corde de 60 mètres et vous atteignez des dalles et des vires en contrebas qui vous ramèneront à R3, soit vous avez des brins de 50 mètres et si vous n’avez pas de crampons, vous allez devoir escalader la paroi en rive droite du glacier pour retrouver le relais qui se trouve en 2017 bien 5 mètres plus haut ! Bon courage…
Tout Va Mal : tout ne va pas si mal !
Cette voie de l’aiguille de Roc a été ouverte par Michel Piola et Gérard Hopfgartner en 1985. En plus du topo de Michel Piola, elle est décrite dans le livre Parois de Légende d’Arnaud Petit et Stéphanie Bodet. Son départ est commun avec la non moins classique Subtilités Dülfériennes.
Après quelques bidouilles et un petit exercice d’artif pour accéder à la voie à cause du recul du glacier assez prononcé et du manque de neige, nous voici dans le premier dièdre au bout d’une heure… ouf. La vraie grimpe peut commencer. Après un peu de dièdre et une traversée à droite en guise d’échauffement, on arrive sous les dalles de la partie inférieure de la paroi. Ça attaque fort et les points sont éloignés… ne pas se laisser impressionner par la première dalle en 6a, ça va mieux après !
Au fur et à mesure qu’on monte la paroi se redresse et les larges vires du début de la voie font place à des murs compacts. Les 4 longueurs à partir de la veine de quartz sont magnifiques et très soutenues, le rocher est très beau et l’ambiance est démente. Des spits protègent les parties les plus compactes et à part dans la longueur cotée 6b+ dans le topo Piola, la pose de coinceurs est nécessaire.
Les longueurs en 6b et 6c s’enchainent. Elles sont dans un style physique qui contraste avec les dalles à friction des longueurs du bas. Ces passages raides et soutenus sont assez exceptionnels et méritent vraiment la visite. On se trouve à droite de l’exceptionnel dièdre de Subtilités Dülfériennes.
La voie se termine par 6 longueurs autour de 5c/6a moins soutenues et plutôt typées fissures. A la descente, il est assez facile de coincer sa corde. Des points ont été placés à côté des relais pour tirer la corde en se décalant. Ne pas hésiter à les utiliser. Naturellement nous avons coincé la corde… ce qui retarde un peu le retour au refuge. Heureusement la bière nous attendait au coin de la table !
Après 4 jours et pas mal de papotages avec les gardiennes (…), nous repartons à Chamonix… par les échelles !
Matériel : matériel de grande voie, 1 jeu complet de camalots jusque le numéro 3 en doublant du 0.4 au 2, 1 jeu de micro, crampons et piolet pour les voies au-dessus des glaciers des Nantillons et de Trélaporte.
Hébergement : au refuge (http://refugelenversdesaiguilles.ffcam.fr) ou en bivouac.
Topo : Envers des Aiguilles de Michel Piola, Parois de Légende d’Arnaud Petit et Stéphanie Bodet.
Encadrement : pour découvrir l’escalade en montagne avec un guide consultez mon site pro.