Escalade et paella à Chulilla
Les vacances de la Toussaint arrivent et toujours pas d’idée de trip grimpe pour la semaine qui vient. La météo annoncée est moyenne un peu partout. L’idée de la Catalogne germe encore dans ma tête mais je reste sur la mauvaise expérience du nouvel an à Margalef et Montsant où les falaises étaient noires de monde. Pourquoi pas pousser plus loin cette fois-ci ? Après tout, si on part pour l’Espagne, nous ne sommes pas à 200 kilomètres près ! Jordi m’avait déja parlé de Chulilla il y a quelques années mais en reparlant de cette falaise à plusieurs personnes, j’entendais toujours les mêmes commentaires : « vieux » et « patiné ». Une petite visite du site http://chulillaclimbing.com aura fini par me convaincre d’y aller. Plus qu’à motiver les troupes et c’est parti, avec les photos du secteur Chorreras, ce fut chose facile !
Chulilla : un petit village non loin de Valencia (Espagne)
Chulilla n’est pas un site aussi connu dans l’hexagone que les sites de grimpe espagnols de Siurana, Margalef ou Rodellar. Sans doute l’absence de voies dans le 9ème degré et le peu d’articles sur la falaise dans la presse spécialisée l’ont laissé à l’ombre des projecteurs. Pas d’Ondra ni de Megos là-bas. Un article de Sam Bié dans le magazine Grimper de janvier 2015 présentait quand même la falaise comme « la nouvelle perle espagnole » : il avait raison, Chulilla est une perle.
Où se trouve Chulilla ? A 45 minutes de route à l’ouest de Valencia en Espagne, capitale mondiale de la paella valenciana. C’est un joli petit village avec de petites maisons blanches et de jolies ruelles que dominent des anciennes fortifications qui datent de la période des Romains et des Maures.
Les secteurs d’escalade se trouvent dans le canyon du Rio Turia qui serpente autour du village, si bien qu’on peut y grimper dans toutes les orientations avec une dominante de secteur à l’Est et au Nord.
Après 7 jours de grimpe sur place, j’ai trouvé que Chulilla c’est un peu une référence espagnole pour le grimpeur de voies de 6 et surtout 7 puisque la majorité des 800 voies que compte la falaise y sont dans ces cotations avec une grande concentration de voies de 7a à 8a. Si je devais comparer Chulilla à une falaise hors d’Europe, je pense tout de suite à Geyik Bayiri par la beauté des voies, le nombre, leur variété et le style de grimpe en mur raide et léger dévers.
La période idéale pour y grimper est l’automne et le printemps. On peut y grimper l’hiver en se couvrant bien dans les secteurs à l’ombre et à la Pared de Enfrente qui est au soleil l’après-midi. Les mois d’octobre, novembre, mars et avril semblent être un bon compromis pour profiter de tous les secteurs de la falaise.
Le secteur principal : Pared de Enfrente
La Pared de Enfrente, littéralement paroi d’en face, est le grand mur qui fait face au village. On y accède directement en 20 minutes de marche depuis le parking à la sortie du village (chercher le chemin qui longe la paroi). On y trouve des voies de toutes les cotations avec des secteurs plus abordables que d’autres. On commencera par se chauffer dans les secteurs du Muro de las Lamentaciones ou de Sex Shop avant de visiter les voies des secteurs du milieu El Ramallar et Tierra de nadie.
Le secteur Muro de las Lamentaciones offre des voies plutôt en dalle dans toutes les cotations, on y trouve des voies en 5, chose rare à Chulilla ! Un secteur idéal pour tenter son premier 7a à vue ou après-travail.
Même si le secteur passe à l’ombre en début d’après-midi, vers 14 h, il est déconseillé d’y grimper au soleil les chaudes journées par plus de 20°C.
Visite obligatoire de quelques belles classiques : La Diagonal (6c+), Los Franceses (7b+), Dalla Dura Negra (7b), El Ramallar (7c+).
Seul bémol : les voies classiques sont un peu usées. Les prises de pieds peuvent être noircies sans que ça gêne l’escalade dans les voies en 7, par contre certaines prises sont très patinées dans certaines voies de 6. La contrepartie est que la lecture à vue est facilitée si bien que certaines voies se parcourent facilement, je ne dirai pas lesquelles pour vous laisser la surprise de l’enchainement !
Pour les chaudes journées : El Embalse
La paroi de El Embalse est le pendant de la Pared de Enfrente : l’orientation y est nord et la plupart des voies ne voient pas le soleil, si bien qu’on y grimpe lors des journées très ensoleillées. On accède à la plupart des secteurs en se garant sous le barrage et en se dirigeant vers les falaises en suivant la rive gauche puis la rive droite du Rio Turia après la passerelle.
Le secteur El Oasis est exceptionnel : on y grimpe dans les palmiers ! Dépaysement garanti. Les voies y sont abordables, à partir de 6a. Le secteur est très prisé des grimpeurs locaux le week-end, mieux vaut y aller en semaine pour être tranquille.
On se chauffe en 6a à 6c dans les très belles voies à trous et concrétions du secteur El Oasis. Le secteur offre ensuite de belles voies en 7a/+. Pourquoi ne pas tenter d’enchainer votre premier 7a à vue ou après travail ? Certaines voies se prêtent bien à la lecture et sont très continues.
Les plus forts pourront essayer les voies plus dures comme Cap i Cua (7c) ou sa voisine de droite en 7b+. Ces 2 voies offrent de beaux objectifs à vue : allez-y !
Le secteur à gauche d’El Oasis, Al Algarrobo offre des murs raides en 7c/+ magnifiques : c’est le cas de Nibelungalos (7c), une des voies les plus classiques de la falaise dans cette difficulté. Pas de pas de bloc mais une belle escalade qui déroule dans ce mur raide parcouru de fines concrétions. Majeur.
Sa voisine de droite, El Planeta Namec, est un ancien 8a mais il faudra bien s’énerver sur des sections plus bloc pour arriver en haut.
Le paradis des colos : chorreras
Le secteur à droite d’El Oasis, Chorrerras, vaut à lui seul le déplacement. Ce haut mur de 55 mètres couvert de colonnettes de toutes tailles propose de belles envolées à partir de 6c/7a. Ce secteur fut un peu le coup de cœur du séjour à Chulilla. Des voies de continuité de plus de 50 mètres, des colonnettes avec de l’escalade en 3D et un beau 8a Super Cantina Marina.
Les cotations du secteur sont assez gentilles, ce qui permet de dérouler sans trop se poser de question. Peu importe la cotation, les voies sont longues et variées ce qui procure énormément de plaisir. Une corde de 100 mètres est nécessaire pour faire l’aller-retour si vous allez en haut ou alors il faut fractionner la descente. Prudence à faire un nœud en bout de corde ! Partir avec 20 dégaines dans ces voies de 50 mètres est un minimum.
Pour les plus forts : El Balcon, El Balconcito et la Pared Blanca
Pour les plus forts, il existe quelques secteurs avec une grande concentration de voies en 8a et 8b : les secteurs El Balcon, Balconcito et Pared Blanca sont tous indiqués pour envoyer des longueurs de 40 mètres au-dessus de 7c+.
L’accès aux secteurs El Balcon et Balconcito se font par une vire équipée de câbles. Les voies de ces secteurs sont à dominante de petites prises en léger dévers. Attention cependant aux départs qui font chauffer les biceps.
Pour accéder à la Pared Blanca, il est préférable de ne pas se garer au barrage mais de faire la marche d’approche depuis la déchèterie. Les voies y sont bien moins usées que les autres secteurs : essayez Super Zeb, un 7c bien technique en dièdre. Un bel objectif à vue.
Que faire les jours de repos ?
Si vous arrivez à vous reposer, les voies sont tellement belles et vous voudrez en profiter à fond, vous pouvez profiter de la vie du village (plutôt le week-end) et visiter le château. Il est obligatoire durant le séjour de commander la paella valenciana dans un des bars/restaurants du village. Prenez-vous y bien à l’avance !
La ville de Valence est à seulement 45 minutes de route et offre un beau centre ville piéton. Les plages ne sont pas très loin pour faire trempette entre deux voies.
Topo, hébergement et vie sur place
Inutile de chercher le topo de Chulilla : en 2015 il était épuisé ! Vous pouvez néanmoins faire quelques photocopies ou prendre des photos du topo à l’office du tourisme de Chulilla ou à l’auberge El Altico où Pedro Pons en personne vous donnera toutes les infos.
Côté matériel, optez pour une corde de 80 mètres minimum et pour 15 à 20 dégaines selon les voies.
Pour l’hébergement, plusieurs solutions s’offrent à vous :
- si vous avez un camion et si vous voulez « squatter », renseignez-vous auprès de l’office du tourisme, le bivouac en camion est toléré sur certains parkings du village, en revanche certaines zones sont interdites à cause du risque d’incendie.
- Chulilla propose plusieurs gites ruraux mais le plus sympa est de loin de dormir à l’El Altico, l’auberge tenue par Pedro Pons, équipeur très actif à Chulilla et Nuria Marti.
Sur place on trouve des bars (dont un seul ouvert en semaine : El Canton sur la place principale), une boulangerie, deux épiceries, un tabac, une station service, autant dire que vous pouvez partir à l’arrache !
Quelques liens pratiques
- Toutes les infos pratiques et quelques topos : http://www.chulillaclimbing.com
- Ville de Chulilla (en espagnol) : http://www.chulilla.es
- Auberge El Altico tenue par Pedro Pons et Nuria Marti : http://www.elaltico.com
Crédits photos : Eric Chaxel, couverture : Margaud dans un 8a au secteur El Balcon.
Super article et je me permets d’indiquer la casa séréna, gite de Peter et Richard, dans une maison typique du village, très accueillants